Exercer le pouvoir disciplinaire et sanctionner les comportements fautifs

En tant qu’employeur, vous disposez d’un pouvoir disciplinaire sur les salariĂ©s de l’entreprise. En pratique, l’exercice de ce pouvoir est très encadrĂ© par le Code du Travail et la jurisprudence. Certaines sanctions sont interdites, et la plupart doivent respecter une procĂ©dure prĂ©cise.

Sommaire de l'article

Les conditions d’exercice du pouvoir disciplinaire

L’employeur peut exercer son pouvoir disciplinaire sur les salariés de son entreprise. Ce droit est encadré par la loi et par la jurisprudence, mais laisse une certaine liberté à l’employeur dans le choix des sanctions qui s’appliquent.
 
Pour pouvoir sanctionner, il faut obligatoirement :
 
  • l’existence d’un fait caractĂ©risant une faute du salariĂ©
  • l’absence de prescription
  • respecter les limites posĂ©es par le droit

L'existence d'une faute

Le code du travail ne définit pas précisément ce qu’est une faute.
 
C’est l’employeur qui apprécie qu’un agissement du salarié est fautif. En cas de conflit sur l’existence ou non d’une faute, c’est le juge qui cherchera à vérifier qu’elle existe bien.
 
La jurisprudence nous permet de préciser ce qui caractérise une faute : c’est un manquement aux obligations liées à la relation de travail. Il s’agit donc de faits liés à la réalisation de la prestation de travail : une action fautive comme une erreur dans le travail, ou un refus de se conformer à une directive. Par exemple : un non-respect de l’obligation de loyauté ou de discrétion, des injures, des violences, des erreurs ou négligences dans l’exercice du travail.

Le délai de prescription

Comme souvent en droit, un délai de prescription s’applique. En matière de droit disciplinaire, il est de 2 mois. L’employeur doit lancer l’action disciplinaire dans les 2 mois qui suivent sa prise de connaissance de la faute.

Les limites posées par le droit

En exerçant son pouvoir disciplinaire, l’employeur va décider de prendre une sanction à l’encontre du salarié. Le Code du Travail considère la sanction comme une mesure autre que l’observation verbale, prise suite à un agissement considéré par l’employeur comme fautif.
 
Attention, si votre entreprise comporte plus de 50 salariés, les sanctions doivent être prévues dans le règlement intérieur. En l’absence de règlement intérieur, aucune sanction ne peut être prise autre que le licenciement.
 
Certaines pratiques sont interdites :
 
  • l’employeur ne peut pas sanctionner plusieurs fois une mĂŞme faute
  • il est interdit de prendre des sanctions pĂ©cuniaires, comme diminuer le salaire, ou opĂ©rer une saisie sur salaire.
  • il est interdit de prendre des sanctions discriminatoires
  • la sanction doit ĂŞtre proportionnĂ©e Ă  la faute commise. Le juge peut contrĂ´ler cet Ă©lĂ©ment Ă  posteriori.

Les sanctions les plus courantes 

Sans procédure disciplinaire

L’avertissement et le blâme sont les sanctions les plus « légères » et ne nécessitent pas de procédure particulière. Elles n’ont pas d’incidence sur la rémunération ou la carrière du salarié :
 
  • l’avertissement: c’est la sanction la plus lĂ©gère, l’employeur adresse un courrier au salariĂ©, et lui expose ses griefs et lui demande de ne pas rĂ©pĂ©ter le comportement fautif.
  • le blâme : c’est une sanction de la mĂŞme nature que l’avertissement, mais avec un degrĂ© plus fort. On peut l’utiliser par exemple si un salariĂ© n’a pas tenu compte du premier avertissement et a renouvelĂ© la faute.

Avec procédure disciplinaire

Les sanctions suivantes nécessitent d’observer une procédure particulière qui sera détaillée plus loin :

  • la mise Ă  pied disciplinaire: c’est une suspension provisoire du contrat de travail et de la rĂ©munĂ©ration. Sa durĂ©e maximum est prĂ©cisĂ©e dans le règlement intĂ©rieur. A ne pas confondre avec la mise Ă  pied conservatoire qui est utilisĂ©e dans l’attente d’un licenciement pour faute grave ou lourde, et qui se poursuit jusqu’au licenciement.
  • la mutation disciplinaire: c’est un changement de poste dans l’entreprise, ou un changement de lieu de travail. Elle implique une modification du contrat de travail, et donc l’accord du salariĂ©. Mais en l’absence d’accord du salariĂ©, l’employeur pourra choisir de prendre une sanction plus lourde.
  • la rĂ©trogradation: c’est une diminution dans les fonctions et les responsabilitĂ©s du salariĂ©. Il s’agit Ă©galement d’une modification du contrat de travail qui nĂ©cessite l’accord du salariĂ©.
  • le licenciement pour faute simple sĂ©rieuse: par exemple des absences injustifiĂ©es ou des erreurs rĂ©pĂ©tĂ©es. Il donne droit Ă  un prĂ©avis de licenciement, au versement d’une indemnitĂ© de licenciement et de l’indemnitĂ© de congĂ©s payĂ©s.
  • le licenciement pour faute grave: il s’agit de troubles sĂ©rieux, qui ont pu engendrer des pertes pour l’entreprise. Le salariĂ© ne bĂ©nĂ©ficie pas d’un prĂ©avis ni d’indemnitĂ©s de licenciement.
  • le licenciement pour faute lourde: elle est caractĂ©risĂ©e par l’intention de nuire du salarié : destruction volontaire, vols commis avec intention de nuire, menaces … Elle ne donne pas lieu au paiement d’un prĂ©avis ni d’indemnitĂ©s. En revanche, depuis 2016, l’employeur doit verser l’indemnitĂ© de congĂ©s payĂ©s. Il peut demander des dommages et intĂ©rĂŞts si l’entreprise a subi un prĂ©judice liĂ© Ă  la faute du salariĂ©.

La procédure à respecter

Pour un avertissement ou un blâme, l’employeur n’a pas de procédure particulière à réaliser, il adresse simplement un courrier au salarié.

Pour les autres sanctions, il faut nécessairement prévoir :
 
  • une convocation Ă  l’entretien : remise en main propre ou en LRAR, elle prĂ©cise la date, l’heure et le lieu de l’entretien, et son objet. Elle informe le salariĂ© qu’il peut ĂŞtre assistĂ© par un reprĂ©sentant du personnel. Si l’entreprise ne dispose pas de reprĂ©sentant du personnel, le salariĂ© peut ĂŞtre assistĂ© par un autre salariĂ© de l’entreprise, ou par un conseiller du salariĂ© extĂ©rieur dont la liste est disponible sur le site de la Dreets . La loi ne fixe pas de dĂ©lai lĂ©gal avant l’entretien, mais dans les faits il doit permettre au salariĂ© de prĂ©parer sa dĂ©fense.
  • l’entretien: c’est un Ă©change entre l’employeur et le salariĂ©. L’employeur commence par exposer les faits qu’il reproche au salariĂ©, qui peut ensuite apporter sa rĂ©ponse. L’entretien doit permettre au salariĂ© de se dĂ©fendre, mais il n’est pas obligĂ© de s’y rendre.
  • la notification de la sanction : elle doit se faire par Ă©crit, minimum 2 jours ouvrĂ©s après l’entretien, et maximum 1 mois après.

Pour conclure

Le pouvoir disciplinaire est une prĂ©rogative importante de l’employeur, qu’il faut savoir utiliser dans le respect des règles de droit pour Ă©viter tout litige ultĂ©rieur.
En cas de doute, nous vous conseillons de faire appel Ă  un avocat.
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