
L’employeur a un devoir d’information auprès de ses salariés. L’obligation d’affichage est là pour répondre à ce devoir d’information. Les informations à afficher dépendent de l’effectif et de l’activité de l’entreprise.
Depuis la création du statut de micro entrepreneur en 2008, qui a grandement simplifié l’entrepreneuriat individuel, le nombre de travailleurs indépendants à explosé.
Le marché du travail est en train de changer, sous l’influence de plusieurs facteurs :
Les entreprises et les travailleurs sont par conséquent séduits par l’opportunité que représente le freelancing. Lorsqu’ils ont besoin d’un renfort, ou de développer leur entreprise, les dirigeants pensent de plus en plus à faire appel à un freelance plutôt que de se lancer dans le recrutement d’un salarié.
Mais très peu ont conscience des risques de requalification associés à ce mode de collaboration.
L’objectif de cet article n’est en aucun cas de vous décourager à avoir recours à des freelances, mais de vous faire prendre conscience des contraintes juridiques, et des risques associés pour votre organisation.
Examinons ce que nous expose le Code du Travail au sujet de la relation freelance / entreprise cliente, dans l’alinéa 1 de l’article L 8221-6 :
Sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription :
1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales ;
2° Les personnes physiques inscrites au registre des entreprises de transport routier de personnes, qui exercent une activité de transport scolaire prévu par l’article L. 214-18 du code de l’éducation ou de transport à la demande conformément à l’article 29 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs ;
3° Les dirigeants des personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés et leurs salariés ;
Ce que cela signifie :
Lorsque vous faites appel à un freelance qui est correctement immatriculé au registre des sociétés, il existe une présomption de non salariat. Vous êtes donc en principe dans un cadre qui n’est pas celui d’un contrat de travail.
Poursuivons la lecture de l’article 8221-6 du Code du Travail, avec l’alinéa 2 :
L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci.
Ce que cela signifie :
L’alinéa 2 précise que cette présomption de non salariat peut être levée si un lien de subordination existe entre l’entreprise cliente et le freelance.
Par conséquent, même si vous avez signé un contrat de prestation conforme, avec un entrepreneur correctement déclaré, celui-ci peut être requalifié en CDI si la situation de travail entre vous fonctionne comme un contrat de travail.
A ce stade, vous vous dites peut-être que le risque est limité, puisqu’il faudrait que le freelance se lance dans la démarche d’attaquer son client pour « obtenir un CDI ».
Quand ils sont dans une situation à risque de requalification, les entreprises opposent souvent l’argument que le freelance ne souhaite pas être en CDI, et donc qu’il n’y a pas de réel risque, car il n’ira pas au tribunal de prud’hommes pour demander une requalification.
Mais ce qu’il est très important de comprendre, c’est que même si aucune des deux parties ne souhaite être liée par un CDI, et n’y voit aucun préjudice, un tiers peut se considérer lésé par cette situation : l’URSSAF.
En effet, dans un contrat de prestation, l’entreprise cliente ne paye pas les cotisations sociales qui sont habituellement dues dans le cadre d’un contrat de travail. C’est donc un manque à gagner important pour l’URSSAF.
La demande de requalification peut provenir :
Conclusion : toutes les entreprises et tous les freelances sont concernés par ce risque.
Le premier élément à avoir en tête est qu’en droit du travail Français, la relation de salariat n’est pas nécessairement liée à la présence d’un contrat écrit.
Dans le cadre d’une relation freelance / entreprise cliente, le juge n’est pas lié par la volonté des parties. Cela signifie qu’il pourra considérer qu’un contrat de travail existe entre votre entreprise et un freelance, même si aucun de vous n’en a exprimé la volonté explicite.
Pour déterminer la présence d’un contrat de travail, on recherche l’existence de trois éléments :
Les deux premiers éléments sont simples à appréhender, et existent systématiquement dans une relation entreprise / freelance : le freelance réalise une prestation (un travail), et perçoit une rémunération (via une facture émise à l’entreprise cliente).
C’est le 3ème élément qui va être crucial pour renverser la présomption de non salariat, et déterminer l’existence d’un contrat de travail : le lien de subordination. C’est aussi le plus complexe à évaluer !
Dans les faits, le juge va rechercher un faisceau d’indices en examinant les conditions réelles d’exercices de l’activité :
Pour bien comprendre comment s’articule dans les faits cette recherche d’indices, examinons quelques exemples de requalifications en CDI.
Cass. soc. – 22 mars 2018
Ce jugement de la cour de cassation expose le cas d’un ancien salarié d’un abattoir, qui après avoir démissionné de son contrat a continué à travailler pour son ancien employeur sous le statut de micro entrepreneur.
Cette personne attaque la société d’abattage pour obtenir la requalification de son contrat de sous traitance en CDI, afin d’obtenir des rappels de salaires, ainsi que les indemnités de licenciement.
Débouté en appel, il porte son cas devant la cour de cassation, qui casse le jugement de la cour d’appel en se basant sur les éléments suivants :
Ces éléments ont permis à la cour de démonter que l’ancien salarié exerçait toujours son activité sous le contrôle de l’employeur, au sein d’un service organisé, en utilisant le matériel de l’entreprise, et sans autonomie dans l’exercice de sa mission.
En conclusion, on ne peut pas faire travailler en freelance un ancien salarié employé aux mêmes fonctions et dans les mêmes conditions que son emploi précédent.
CA Nîmes – 29 janvier 2019
Cette demande de requalification était à l’initiative de l’URSSAF, suite à un contrôle au sein de l’entreprise.
Une assistante administrative exerçait son activité au sein d’une entreprise sous le statut de micro entrepreneur. Elle disposait des clés des locaux, ainsi que d’un bureau dédié.
Par ailleurs, elle travaillait de manière constante pour un seul client, à qui elle facturait des montants réguliers. Elle ne cherchait pas à développer sa clientèle.
On est ici en présence d’un cas de dépendance économique du freelance vis à vis de l’entreprise cliente, qui est son unique source de revenus.
En conclusion, la situation de dépendance économique pour un freelance ayant un seul client est un élément permettant au juge d’établir un lien de subordination, et par conséquent l’existence d’un contrat de travail.
Cass. Soc. – 28 novembre 2018
Ce jugement concerne la plateforme de livraison Take Eat Easy, qui met en relation des restaurants et des particuliers, via des livreurs à vélo au statut de micro-entrepreneur.
Un livreur, ayant eu deux accidents de travail, a saisi la justice pour faire requalifier son contrat de prestation en contrat de travail.
Dans les faits, l’entreprise Take Eat Easy fournissait à ses livreurs une application de gestion des livraisons, qui lui permettait de suivre la position du livreur en temps réel, et de comptabiliser les kilomètres parcourus. Par ailleurs, le système permettait d’appliquer des sanctions au livreur via des pénalités en cas de manquement à leurs obligations.
Jugeant que l’entreprise avait la possibilité de contrôler de manière précise le travail du livreur, et de lui infliger des sanctions, la cour de cassation a conclu qu’un lien de subordination existait entre les deux parties.
En conclusion, une entreprise cliente ne peut pas contrôler le travail de ses freelances, ni appliquer de sanction à leur encontre.
La requalification en CDI vous expose au versement :
Dans le cadre du travail dissimulé, les sanctions pénales encourues sont les suivantes :
D’autres sanctions s’ajoutent en conséquence de la condamnation pénale pour travail dissimulé :
Vous avez besoin de renfort sur un sujet, et vous envisagez de recourir à un freelance ?
Dans quel cas de figure êtes vous ?
✖️ ne pas faire travailler des anciens salariés de l’entreprise en freelance
✖️ ne pas intégrer un freelance dans l’organigramme
✖️ ne pas attribuer un supérieur hiérarchique au freelance
✖️ ne pas intégrer un freelance au sein d’un service organisé, parmi d’autres salariés de votre entreprise, encadré par un de vos managers
✖️ ne pas fournir de carte de visite de votre société au nom du freelance
✖️ laisser au freelance un maximum de flexibilité sur son organisation et sur les moyens mis en oeuvre pour réaliser sa mission
✖️ ne pas fournir ou imposer d’outil ou d’équipement
✖️ ne pas faire bénéficier les freelances des avantages de l’entreprise
✖️ ne pas fixer ses jours de repos
✖️ ne pas imposer d’horaires de travail et de pause
✖️ ne pas intégrer le freelance aux planning de l’entreprise
✖️ ne pas renvoyer vers un freelance dans vos messages d’absences automatique
✖️ ne pas inclure le freelance dans vos mailing list interne
✖️ ne pas procéder à des entretiens d’évaluation ou de performance avec vos freelance
Le développement de l’entrepreneuriat individuel est une bonne chose pour les travailleurs, qui aspirent à plus de liberté, et pour les entreprises, qui aspirent à une plus grande flexibilité.
Cependant, imaginer qu’on peut remplacer le recrutement de salariés en CDD ou en CDI par des freelance est une erreur : le Code du Travail et les juges sont clairs sur ce sujet, et des sanctions lourdes menacent les entreprises qui n’en tiendraient pas compte.
Travailler en freelance implique une grande indépendance, et il ne doit exister dans les faits aucun lien de subordination entre le travailleur indépendant et ses clients.
En tant que chef d’entreprise, vous devez être conscient de vos obligations, mesurer vos risques, et prendre des mesures pour les limiter. Une analyse de vos risques RH mettra en lumière les points forts et les zones de risque.
En cas de doute sur vos pratiques de recours aux travailleurs en freelance, n’hésitez pas à solliciter l’avis d’un avocat en droit du travail.
Identifiez les points sensibles de vos collaborations freelance pour éviter tout risque de requalification.
L’employeur a un devoir d’information auprès de ses salariés. L’obligation d’affichage est là pour répondre à ce devoir d’information. Les informations à afficher dépendent de l’effectif et de l’activité de l’entreprise.
La période d’essai est une des clauses les plus souvent présentes dans les contrats de travail. La rédaction d’une clause de période d’essai ne va pas de soi, et doit être traitée avec une grande attention. Retrouvez l’ensemble des points de vigilance pour les périodes d’essai en CDI.
Dès l’embauche du premier salarié, la règlementation prévoit la mise en place de registres obligatoires, qui font régulièrement l’objet de contrôles par l’inspection du travail. Vous devez être particulièrement attentifs à la tenue et la mise à jour régulière de ces registres.
Vous mettez en œuvre la transparence salariale dans votre entreprise ? Notre audit RH vous aide à évaluer la conformité de vos pratiques, identifier les risques juridiques et structurer une politique d’égalité salariale solide.